Anesthésie...

Nombre de messages : 52 Date d'inscription : 18/04/2007

Citation :: Je suis couché sur un brancard, poussé dans les couloirs de l'hôpital par un visage rassurant. Je croise infirmières et des aides-soignantes qui m'adressent ce regard souriant qu'elles ont souvent pour les enfants. Je roule dans un monde blanc : murs, plafonds, draps, habité par des hommes – mais surtout des femmes – tout de blanc vêtus. J'entre dans l'ascenseur et je descends, je change de monde. Tout est vert... Des murs verts, un plafond vert, des hommes verts. Oui, surtout des hommes.

Je roule encore et m'arrête. On me soulève et me pose sur une table éclairée par un projecteur qui diffuse une bien étrange lumière. Les hommes en vert sourient, se veulent rassurants. Masque ou piqûre, m'avait-on demandé... Masque bien-sûr, quel enfant choisirait l'aiguille de son plein gré ? Et un homme me pose ce masque sur la bouche et le nez et me demande de compter. Je respire et inhale ce gaz anesthésiant, commence à compter.

Un, deux... Mon corps s'engourdit plus vite que mon esprit. Des fourmis semblent parcourir mes doigts, mes bras. Trois, quatre... Mes yeux se ferment, le monde vert disparaît. Cinq, six... Je ne me rappelle pas avoir compté si loin la première fois. Sept, huit... Mes oreilles bourdonnent mais je distingue encore les voix des hommes en vert qui semblent commencer leur besogne... Mais je ne sens plus mon corps et ne voit plus rien, comment saurais-je ? Je voudrais leur dire d'attendre, mais mes lèvres ne bougent plus et ma langue pâteuse reste immobile. Neuf, dix... Le toucher, la vue, l'odorat saturé par le gaz s'en sont allés, mais l'ouïe et le goût paraissent vouloir résister. L'instant me semble si long, mais mon esprit échoué aux portes de l'inconscience ne sait plus compter. Et puis, plus rien...

Fantasme d'un esprit anesthésié ou réalité remémorée, il me semble m'éveiller. Dans ma chambre comme à l'habitude ? Non... Sur cette table, toujours opéré... Mais, à peine conscient, je ne vois pas et ne sens rien : seuls une bribes de mon esprit et mon ouïe semblent fonctionner. Horrifié ? Non, je ne peux ni réfléchir ni réaliser... Je ne comprendrai que plus tard, bien plus tard. Et ce rêve s'envole, ou l'anesthésiste me renvoie dans le néant de la totale inconscience.